Des Hommes de Laurent Mauvignier
Ils ont été appelés en Algérie au moment des "événements", en 1960. Deux ans plus tard, Bernard, Rabut, Février et d'autres sont rentrés en France. Ils se sont tus, ils ont vécu leurs vies. Mais parfois il suffit de presque rien, d'une journée d’anniversaire en hiver, d'un cadeau qui tient dans la poche, pour que, quarante ans après, le passé fasse irruption dans la vie de ceux qui ont cru pouvoir le nier.
Mon avis... "Plus le temps passe, plus il se répète, sans pouvoir se raisonner, que lui, s'il était Algérien, sans doute il serait fellaga. Il ne sait pas pourquoi il a cette idée, qu'il veut chasser très vite, dès qu'il pense au corps du médecin dans la poussière. Quels sont les hommes qui peuvent faire ça. Pas des hommes qui font ça. Et pourtant. Des hommes. Il se dit pourtant parfois que lui ce serait un fellaga. Parce que les paysans qui ne peuvent pas travailler leur terre. Parce que la pauvreté. Même si certains lui disent qu'on est là pour eux. On vient donner la paix et la civilisation. Oui. (...)" "Des hommes" s'attache à "comprendre, une fois que c'est arrivé, comment cela modifie, et en quoi, celui qui porte la trace de ce passage au monde" (Laurent Mauvignier, magazine Page, septembre 2009, p.46).
La guerre ne laisse jamais en paix ..."Je voudrais savoir si l'on peut commencer à vivre quand on sait que c'est trop tard" (p.281).
Laurent Mauvignier est un grand Auteur tant la force de la tragédie frappe et bouscule. Sa plume voluptueuse et singulière vous envoûte dès les premières pages. La construction de ce récit est finement élaborée et donne d'autant plus de puissance à l'Histoire. Laurent Mauvignier choisit de débuter l'intrigue lors d'une fête de famille ... véritable catalyseur qui fera ressurgir le passé douloureux de trois hommes appelés en Algérie. Ce roman ne laisse pas indemne, l'intensité des confidences heurte et interroge.