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L'Antre des mots
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20 avril 2010

COMPARTIMENT POUR DAMES d'Anita MAIR (Inde)

Lorsque des femmes indiennes peuvent "ouvrir" leur coeur et exprimer par la parole ce qu'elles taisent habituellement cela donne le beau roman d'Anita Mair "Compartiment pour dames". Ce compartiment c'est celui d'un train qui mène cinq femmes, de conditions et d'âges divers, "vers la mer" dans le sud de l'Inde. Cet habitacle clos, réunissant des femmes qui ne se connaissent pas et ne se reverront sans doute jamais, est propice à l'éclosion de confidences. Akhila est le personnage central de ce roman. Pour la première fois elle rompt les amarres, "rêvant d'espace et d'évasion", "avide de vie et d'expérience". Elle a un statut que personne ne lui envie : 45 ans et célibataire... par nécessité parce qu'en tant qu'aînée il lui a fallu se consacrer sans relâche à sa famille après le décès de ses parents, faisant fi de ses propres aspirations mais enfermant en elle  un lot de frustrations ! Maintenant que ses frères et soeurs sont installés, elle aimerait éventuellement partager sa vie avec quelqu'un mais surtout être indépendante. Une question la tenaille, qu'elle soumet à ses compagnes de voyages, espérant en retour quelques conseils : "une femme peut-elle s'en sortir seule ; n'a-t-elle pas besoin d'un homme pour vivre ?". Cette question est l'occasion pour chacune de revisiter son passé et de raconter "son histoire". On découvre que ces femmes, toutes mariées sauf la jeune Sheela, loin d'être comblées par leur statut ô combien "respectable" et incontournable, d'épouses et de mères, ont beaucoup à dire sur le poids que la tradition fait peser sur elles, sans échappatoire possible, si ce n'est par les "ruses" ou petits complots du quotidien qu'elles concoctent secrètement. Une femme mariée est une femme "consacrée" : au bien-être de son mari, à l'éducation de ses enfants, tout ceci dans un esprit de soumission et d'acceptation de "tout" ce qui peut surgir sans qu'elle puisse ni se rebeller, ni revendiquer. Sa condition est celle d'opprimée.

Ce livre d'une auteur(e) qui de par son parcours s'est frottée à d'autres cultures (originaire du Kerala, elle a voyagé en Angleterre et aux Etats-Unis et l'anglais est sa première langue) parle au nom de toutes ces femmes qui n'ont pas le pouvoir de le faire. Ce roman est une façon de leur dire : "dans cette société où la tradition vous maintient dans un rôle d'être inférieur, vous avez des droits, vous avez une identité à faire valoir". Dans ce roman qui n'est certes pas écrit à l'eau de rose, la fin est une petite bouffée d'air frais vivifiante.

Cette narration polyphonique permet de partager la condition de femmes façonnées par une autre culture et d'espérer pour elles et avec elles un avenir autant que possible  choisi,  et donc plus prometteur et plus exaltant aussi.

Annie du B

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