Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
L'Antre des mots
Newsletter
Visiteurs
Depuis la création 144 979
29 novembre 2009

Au pays des vermeilles de Noëlle CHATELET

Au pays des vermeilles   ….ou « Je commence à devenir assez grande pour redevenir petite » p31


 

 

 

 

 

Noëlle Châtelet, édition du seuil, 2009


 

 

 

Acheté pour une amie qui, comme moi, devient Mamie, et pour l’auteur dont le précédent livre sur la mort choisie de sa mère : « La dernière leçon » , m’avait émue. Noëlle Châtelet, c’est aussi une rencontre au 1er Festival des Mots à

La Charité

sur Loire, pique-nique le long de

la Loire

où j’avais pu l’aborder.

 

 

 

 

Plaisir auusi du titre doublement ludique dans sa référence à Alice, titre métaphorique qui me renvoie à ma propre expérimentation de l’entrée dans un autre pays, quand sa fille met au monde un petit. Entrée connue et inconnue à la fois où se jouent toutes les strates du temps.


 

 

 

Et c’est ce qu’explorent les courts chapitres de ce journal de bord d’une nouvelle mamie. La métaphore d’Alice et les transformations de taille et de temps sont décrits avec justesse , concision et interrogations :


 

« Comme ce célèbre tableau de Munch dont le cri universel semble déverser tout le malheur, toute la souffrance du monde, ta bouche est souffrance . Désespoir. Désespérés aussi tes deux petits poings fermés, comme déréglés, qui battent l’air jusqu’à la suffocation. On t’a poussée dehors, maintenant tu pousses des cris. Seule. Infiniment seule.


 

Au pied de ton berceau, j’assiste à ma propre impuissance.Mes poings se ferment.Vont-ils se dérégler, battre l’air ?


 

Remontée vertigineuse du temps : je suis bouche, je suis cri.


 

Je me regarde hurler, seule, infiniment seule devant l’énigme de la vie.


 

J’ai deux mois à peine » p 22


 

 

 

Ce livre est un dialogue entre l’auteur et sa petite fille, mais aussi entre avec le père de l’enfant, son fils ou plûtôt avec le fils qu’il fut et donc la mère qu’elle a été pour ce fils devenu père et bien sûr avec l’enfant que Noëlle Châtelet fut ou est encore, jeux de miroirs infinis qui s’avèrent révélateurs ; cela apparaît dans les beaux dialogues entretenus avec la mère disparue.


 

 

 

C’est pour ces dialogues transgénérationels qui s’édifient et se construisent par l’écriture que ce récit, somme toute banal de grand maternité ,vaut. Car l’auteur n’aborde pas ce continent nouveau avec  la conscience adulte du narrateur de la nouvelle « Mano » comme elle va se faire appeler, mais avec tous les états successifs ou superposés de son expérience.


 

On retrouve le jeu d’un « je » qui en interpelle un autre comme dans Enfance de N.Sarraute.


 

 

 

D’autre part, ce qui m’a touchée dans ce récit , moi qui suis une « Manou » depuis deux mois….c’est la possibilité  de revivre ces moments de grâce devant ces petits qui nous troublent et nous émeuvent au-delà du rationnel : ces instantanés littéraires si empreints de profondeur sont …mieux que ces albums photos qu’on s’empresse de montrer pour que revivent ces moments- là si vite et joliement perturbés  par les évolutions magnifiques de l’être en devenir.


 

 

 

Ainsi les temps passés restent peut-être un peu, pour ce qu’ils ont éveillés en nous de singulier….


 

Rien de pédant, dans ces multiples scènes d’habillage, de chevaux de bois ou de cinéma mais un éloge discret au temps qui nous fait femme, mère, fille et grand-mère :


 

« Je suis grand-mère, ma mère, pour admirerle ricochet de ces petites pierres vermeilles sur l’étendue de la mémoire. Les regarder bondir. Rebondir.


 

Je me dis : Un jour , les ricochets se feront sans moi, mais la pierre que j’ai été sera de la partie » p 80


 

 

 

Enfin , ce coup de cœur pour ce livre tient à ce qu’il est coécrit….à découvrir  comment p114, ce qui fait dire à l’auteur :


 

« Allons, Mano ! Voyons, c’est évident ! N’est-ce pas notre livre ? »

Anne P

 

Publicité
Commentaires
L'Antre des mots
Publicité
Archives
Derniers commentaires
Publicité