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L'Antre des mots
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31 mars 2009

A l'angle du Renard de Fabienne Juhel

A l’angle du renard

Arsène Le Rigoleur est un paysan breton attaché à sa terre comme un renard. Une famille citadine vient s'installer dans la ferme voisine et commence à empiéter sur son territoire. Mais Arsène n'est pas le simplet que l'on pourrait croire. C'est un assassin.

________

Le livre commence par ces lignes :

" Quand la lune est rousse, il faut pas oublier de rentrer son linge. Tout le monde sait ça. Eh bien apparemment pas la nouvelle voisine".

Le sujet est lancé : deux civilisations vont se côtoyer.

- les paysans qui vivent au rythme des saisons, avec leurs croyances, leur instinct, leur franc-parler, leurs bêtes à soigner et leurs odeurs, brutes.

- Des citadins, les Maffart, qui veulent habiter la campagne, achètent une ancienne ferme pour la transformer en superbe villa. Cela finit par défigurer le village.

Leurs deux enfants, Juliette et Louis, vont créer des liens entre voisins, forcément complexes, qui se limitent à l'occupation d'un territoire qu'ils partagent, chacun à leur façon :

page 168 : "Marie Maffart a planté ses yeux dans les miens. Des poignards, on dirait. Elle reste comme ça, un long moment à me fixer. On se dit des choses dans un langage animal. Ma main à couper qu'on dégage d'autres odeurs corporelles. Des fragrances musquées qui servent à baliser nos territoires respectifs, des marqueurs de pisse et de sueur..."

L'histoire ne se raconte pas car on se retrouve très vite embarqué dans un conte fantastique (la frontière entre l'homme et la bête est trouble). Parfois, on se sent en plein thriller tellement le malaise augmente. L'atmosphère devient de plus en plus oppressante car on craint le pire pour les deux enfants qui sont attirés par Arsène et qui va marquer leur enfance, à la campagne. La fin n’est pas celle qu’on attendait.

Le tout dans une langue qui m'a tout de suite séduite : âpre, ironique, populaire, vraie, d'une beauté absolue.

page 98 : la mère donne un conseil à son fils, Arsène : "Donne toi garde qu'il n'y ait pas un pendu dans le placard de ta belle-famille".

Ce livre, singulier, m'a envoûtée. J'ai trouvé le cas d'Arsène intéressant : un homme de la terre, qui n'a peur de rien. Son comportement avec les enfants est sidérant : il sait écouter, comprendre, poser les bonnes questions, interpréter les dessins. Jamais je n'ai rencontré un personnage aussi libre.

Et puis, je me suis retrouvée, toute petite fille, dans la ferme où je passais mes vacances, en Lorraine : les champs, la fontaine, le poulailler, la traite des vaches, les cochons, les lapins, le tracteur orange, les paysans et leur manière d'être et surtout les odeurs, sans eau de Cologne.

PS : ce livre est en compétition pour le Prix Ouest France Etonnants Voyageurs 2009. Fabienne Juhel mérite une distinction, selon moi.

Marie-Jo

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Commentaires
M
C'était le thème d'Etonnants Voyageurs à St-Malo, le week end dernier. Le premier prix a été attribué à Fabienne Juhel pour le livre cité ci-dessus. C'est remarquable.
L'Antre des mots
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